Article

Nos vues d’ici la fin de l’année : des perspectives plus mitigées

Que pouvons-nous attendre des marchés financiers d’ici la fin de l’année ? Nos experts de La Banque Postale Asset Management et Tocqueville Finance nous partagent leur analyse. Quels secteurs privilégier pour les mois à venir ? Explications.

  • #bourse
  • #investissements
Lecture 3 min

Après une année 2022 marquée par une baisse de près de 15 % des actions et des obligations, les marchés ont partiellement rebondi début 2023. Les actions et les obligations mondiales ont progressé de respectivement 7 % et 2,5 % au cours des deux premiers mois de l’année avant de globalement stagner depuis le mois de mars. Cette progression est la conséquence d’une conjoncture économique plus clémente malgré ce que certains scénarios faisaient craindre en 2022.

Le rebond des actifs risqués au début de l’année s’explique en premier lieu par la résistance de l’économie mondiale. La baisse des prix de l’énergie, le soutien des politiques budgétaires et la solidité des marchés de l’emploi ont réduit le risque d’une sévère récession notamment en Europe. Au 1er trimestre, la croissance est restée faible mais stable :  l’Europe a stagné tout en évitant la récession cet hiver ; la Chine a redémarré après la fin de la politique dite « Zéro-Covid » ; et la consommation américaine est restée solide. Concernant les entreprises, de part et d’autre de l’Atlantique leurs bénéfices ont baissé sur un an après avoir atteint des niveaux historiques en 2022, même s’ils restent encore élevés et nettement au-dessus des attentes des analystes.

D’autre part, l’inflation a commencé à ralentir depuis fin 2022, passant de 7,5 % à 5,5 % sous l’effet de la désinflation énergétique. Cependant, l’inflation sous-jacente s’est seulement stabilisée à 5 % début 2023, ne montrant de premiers signes d’accalmie que depuis le mois de mars. Ces dernières données semblent donc indiquer que le pic d’inflation est bel et bien passé, quand bien même les pressions inflationnistes mettront certainement du temps à se normaliser.

Pourtant, le contexte macroéconomique demeurant difficilement lisible pour les marchés et les primes restant insuffisamment proportionnées aux risques auxquels ils sont exposés, la prudence dans l’allocation d’actifs est recommandée.

Le stress bancaire survenu mi-mars aux Etats-Unis semble contenu et ne devrait donc pas poser de risque systémique. Il montre que les marchés et l’économie ne sont pas insensibles au resserrement des politiques monétaires engagé depuis un an. La Fed et la BCE ont fortement remonté leur taux en partant de niveaux historiquement bas début 2022 jusqu’à atteindre actuellement des plus hauts depuis 15 ans. Parallèlement, elles ont également commencé à retirer graduellement les liquidités injectées pendant la période de crise sanitaire. La fin du cycle de hausse de taux directeurs est désormais proche mais les banques centrales devraient maintenir des politiques monétaires restrictives pendant plusieurs trimestres, le temps que les pressions sur les salaires et les services baissent plus nettement. Dans ce contexte, les conditions d’accès au crédit pour l’économie réelle et les dépôts des agents non financiers se sont fortement détériorés depuis fin 2022, ce qui devrait peser sur la croissance dans les prochains trimestres.

Face aux taux courts élevés, les valorisations des actifs financiers n’apparaissent pas si attractives, alors qu’elles ne sont en fait pas particulièrement élevées. Cela incite à une allocation diversifiée et sélective. Les taux longs se sont déjà fortement ajustés à la hausse l’année dernière (de plus de 2 %), mais ils n’intègrent toujours pas de prime particulière malgré le risque d’inflation persistante et la dégradation des finances publiques. Pour les actions, les valorisations sont plus de 20 % sous les points hauts de 2021 et globalement en ligne avec leur niveau pré-covid. Mais ce niveau de valorisation est moyen si l’on considère que les taux réels sont plus élevés qu’avant le Covid reposant, aussi, sur des anticipations de bénéfices optimistes compte tenu des pressions baissières sur les marges des entreprises. Pour le crédit, les primes de risque semblent un peu plus attractives, lors bien même que la normalisation des taux de défaut requiert de la vigilance sur les entreprises les plus à risque.

Des perspectives encore mitigées pour cette année

  • Nous pensons que la Zone Euro devrait éviter la récession en 2023 mais que la croissance restera faible cette année (et l’an prochain aussi). Pour les Etats-Unis, nous envisageons toujours une légère récession dans la seconde partie de l’année. La Chine bénéficierait selon nous d’un rebond fort sur les 6 prochains mois grâce à la reprise de la consommation après une année 2022 très faible et à la stabilisation de l’immobilier, mais les perspectives au-delà restent plus incertaines. Sur le plan de l’inflation, nous prévoyons un ralentissement rapide jusqu’à la fin de l’année grâce à la baisse du prix des matières premières et à la normalisation du prix de certains biens, en particulier aux États-Unis. Mais en l’absence de récession marquée, l’inflation devrait rester bien supérieure à la cible de 2 % jusqu’à fin 2024 car il faudrait du temps pour que les pressions sur le prix des services et sur les salaires se calment. 
  • Sur le plan géopolitique, les tensions et les incertitudes devraient rester élevées. La situation en Ukraine et les sanctions sur la Russie devraient continuer de peser sur les perspectives et l’opposition stratégique entre les États-Unis et la Chine a peu de chance de s’apaiser, d’autant plus que les élections américaines de 2024 se rapprochent. Si les prix de l’énergie ont fortement baissé, l’équilibre énergétique mondial restera cependant fragile. 
  • La Fed a probablement fini son cycle de hausse de taux mais elle devrait maintenir une politique monétaire restrictive, avec un taux directeur au-dessus de 5 % jusqu’à l’année prochaine. Côté européen, les hausses de taux de la BCE devraient se poursuivre cet été, portant le taux directeur à 3,5 % au moins, alors que la réduction du bilan de la BCE s’accélèrera.  

Les perspectives en termes d'allocation d'actifs pour la fin 2023

  • Nous restons globalement prudents après la bonne performance des marchés, car il nous semble que les primes de risques sont un peu faibles par rapport aux taux courts élevés, dans un contexte de ralentissement économique et de conditions monétaires durablement restrictives. Cependant, nous ne sommes pas totalement défensifs car les valorisations des marchés ne sont pas si élevées alors que les scénarios les plus adverses ne se réalisent pas. 
  • Nous sommes en légère sous-pondération sur les obligations publiques car le risque sur les taux directeurs reste orienté à la hausse, même si le cycle de resserrement monétaire approche de sa fin et que la majorité de l’ajustement des taux est déjà faite selon nous.  Nous préférons les dettes des Etats cœurs, de maturités courtes en Zone Euro et de maturités plus longues aux Etats-Unis.  
  • Nous pensons que le Crédit (obligations privées) offre un rendement intéressant en Europe, surtout en l’absence de récession d’ici la fin de l’année. Nous préférons les entreprises les plus solides dans un contexte de hausse des coûts de financement et de resserrement des conditions de crédits à celles plus à risque. 
  • Nous conservons encore une légère sous-pondération générale sur les actions dont les valorisations ne sont pas si attractives compte tenu des taux d’intérêt élevés alors que les profits des entreprises devraient être sous pression. Nous privilégions les entreprises aux bilans solides et les mieux à même de protéger leurs marges dans un contexte de hausse des coûts. Une exposition tactique à la Chine nous semble intéressante grâce à la réouverture de son économie, directement ou indirectement via des entreprises européennes exposées à la consommation chinoise.

Articles associés

Less solutions de La Banque Postale