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Conjoncture économique et financière : quelles perspectives pour la fin d’année ?

L’économie mondiale a bien résisté aux chocs du 1er semestre, mais a commencé à ralentir fortement cet été. Les perspectives continuent de se dégrader avec l’aggravation de la crise énergétique en Europe, la poursuite de la politique zéro-Covid et de l’ajustement immobilier en Chine, ainsi que les hausses de taux agressives des banques centrales pour reprendre le contrôle de l’inflation. Si l’inflation devrait commencer à ralentir aux Etats-Unis, ce n’est pas le cas en Europe. Surtout, les pressions inflationnistes tendancielles doivent encore être contrôlées dans les grands pays.

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Les marchés baissent de nouveau fortement depuis mi-août après un rebond technique cet été. Comme nous le pensions, ils réalisent que les banques centrales ne vont pas venir à leur rescousse malgré la dégradation des perspectives, car elles sont contraintes par les risques que l’inflation ne devienne persistante.  Du côté positif, le prix des actifs intègre de nouveau beaucoup de mauvaises nouvelles. Dans ce contexte, découvrez les choix d’investissement de nos experts de La Banque Postale Asset Management. 

Nos convictions sur l’environnement économique global à un horizon de trois mois

Les perspectives de croissance se dégradent alors que les banques centrales luttent contre l’inflation. La toile de fond macroéconomique pour les marchés dans la seconde partie de l’année devrait rester dégradée et incertaine, avec un net ralentissement de la croissance et une inflation toujours trop élevée pour que les banques centrales puissent réduire leur resserrement monétaire.

Les trois principaux risques pour l’économie mondiale que nous soulignons depuis le début de l’année, qui semblaient s’atténuer, se sont de nouveau renforcés depuis août :

  • La crise énergétique s’est accentuée, en particulier pour l’Europe. La Russie a continué de réduire ses livraisons de gaz à l’Europe qui sont proches de zéro depuis fin août, ce qui a entraîné une nouvelle hausse de 150 % du prix du gaz par rapport au premier semestre. Et comme la guerre en Ukraine et les sanctions sur la Russie ont peu de chance de cesser dans les prochains mois, le scénario central devient celui d’une absence de gaz russe pour l’Europe cet hiver. Cela implique que les prix devraient rester très élevés et que la demande de gaz devra être plus faible. La bonne nouvelle est que les stocks de gaz ont continué d’augmenter vers des niveaux satisfaisants et que la demande de gaz a déjà nettement baissé cet été. Ceci limite le risque que des rationnements/coupures importants soient nécessaires durant l’hiver. Par ailleurs, le prix du pétrole a continué de baisser légèrement cet été en raison des perspectives de croissance plus faibles, mais ils restent élevés, car l’OPEP+ continue de limiter sa production. Au total, le choc énergétique en Europe est plus important que ceux des années 1970 et rend une récession en Europe difficilement évitable à court terme, même si nous pensons qu’elle pourrait être limitée grâce aux soutiens budgétaires croissants annoncés par les gouvernements et d’autant plus si l’hiver n’est pas trop rigoureux.
  • La reprise de l’économie chinoise, cet été, est plus faible qu’attendu en raison des nouveaux confinements imposés dans le cadre de la politique zéro-COVID et de la poursuite de l’ajustement de l’immobilier, ce qui pèse fortement sur la demande privée. Comme les autorités continuent de préférer des mesures de stimulus ciblées, bien moins importantes que lors des précédents ralentissements de l’économie chinoise, nous pensons que les « espoirs » de fort rebond de l’économie sont faibles, au moins jusqu’au congrès du Parti Communiste de fin octobre lors duquel le Président Xi devrait obtenir un troisième mandat.
  • Après un fort rebond du prix des actifs cet été, les conditions financières se sont de nouveau nettement dégradées depuis mi-août après que la Fed et la BCE aient douché les espoirs des marchés qui espéraient qu’elles allaient être moins dures face aux risques de récession. En effet, elles ont poursuivi leur resserrement à marche forcée. Cela a entraîné un rebond des taux d’intérêts vers leurs plus hauts de mi-juin, une nouvelle baisse des actions vers leurs points bas de mi-juin et une forte appréciation du dollar. Si la Fed souhaite faire ralentir l’économie américaine en douceur, l’histoire montre que le risque que cela entraîne une récession est important. En Europe et pour le reste du monde, le durcissement des conditions financières locales et américaines augmente le risque de choc financier et pèsera nettement sur l’activité dans les prochains trimestres. 

La croissance a mieux résisté qu’attendu dans la première partie de l’année, mais elle ralentit nettement cet été, en particulier hors des Etats-Unis. Ce ralentissement et les facteurs négatifs indiqués ci-dessus renforcent notre conviction que le scénario le plus probable est celui d’une légère récession à la fin 2022/début 2023 des deux côtés de l’Atlantique.

  • Aux Etats-Unis, le PIB a baissé pour le second trimestre consécutif au T2 (-0.6 % après -1.6 % en rythme annualisé), ce qui est la définition d’une récession technique. Mais l’économie américaine a été en réalité assez solide. La baisse du PIB est due aux composantes volatiles (stocks, commerce extérieur) alors que l’emploi, les revenus et la consommation ont continué de progresser. Toutefois, l’économie ralentit depuis le T2 avec une demande de biens qui commence à se normaliser après son rebond post-Covid et un secteur de l’immobilier qui se dégrade après la forte hausse des taux hypothécaires et un marché de l’emploi qui commence à ralentir même s’il reste solide. Nous anticipons que l’économie américaine va ralentir graduellement jusqu’à la fin de l’année.
  • En Zone Euro, la croissance a été revue en hausse pour la première partie de l'année, avec un PIB en hausse de 0,8 % au T2 après une hausse de 0,7 % sur le trimestre T1. Cette croissance a été tirée par l’Italie et l’Espagne qui ont fortement bénéficié de la réouverture post-Omicron, notamment le secteur du tourisme, ainsi que des fonds européens. En revanche, la croissance a été plus limitée en France et l’activité a stagné en Allemagne, qui est très impactée par la crise du gaz et les perturbations de chaines de production en Europe de l’Est. Malheureusement, la bonne surprise de la croissance du 1S22 pour l’ensemble de la zone semble derrière nous. En effet, le PMI de la Zone Euro a chuté en juillet et août et est passé sous la barre des 50pb pour la première fois depuis début 2021, suggérant un net ralentissement de l’activité au T3 sous l’effet de l’essoufflement du soutien lié à la réouverture alors même que le pouvoir d’achat des ménages est amputé. Cela dit, le marché du travail reste très solide, le taux de chômage atteignant un nouveau plus bas historique en juillet (à 6,6 %). Nous prévoyons une légère baisse du PIB dans les prochains trimestres avec un risque de récession sévère en cas de rationnements d’énergie.

Le pic d’inflation est probablement passé aux Etats-Unis, mais pas encore en Europe en raison de la nouvelle hausse du prix de l’énergie. Mais l’inflation devrait rester très au-dessus des cibles des deux côtés de l’Atlantique au moins jusqu’à fin 2023. 

Aux Etats-Unis, l’inflation a baissé en juillet de 9.1 % à 8.5 %, grâce à la baisse des prix de l’essence et des biens les plus impactés par la Covid. De plus, les salaires ont été moins dynamiques qu’attendus en août. L’inflation devrait commencer à refluer grâce aux effets de base, à la baisse des tensions sur les chaines de production mondiales et à la hausse du dollar. Mais l’inflation dans les services continue de progresser bien au-delà de la cible de 2 % et les salaires restent très élevés, de telle sorte que l’inflation devrait mettre du temps à durablement retrouver des niveaux acceptables pour la Fed. En Zone Euro, l’inflation a continué d’accélérer en atteignant 9.1 % en août, un nouveau plus haut historique. Si cela reflète en grande partie la nouvelle hausse du prix de l’énergie et de l’alimentation, l’inflation sous-jacente accélère de nouveau et dépasse les 4 %, c’est-à-dire le double de la cible de la BCE. Nous anticipons que l’inflation accélère encore dans la seconde partie de l’année et s’approche voire dépasse 10 %, avant de ralentir en 2023.

Les banques centrales montent leurs taux agressivement et restent totalement concentrées sur la reprise du contrôle de l’inflation, une dynamique qui devrait se poursuivre dans les prochains mois.

La Fed a remonté son taux directeur de 75pb pour la deuxième fois consécutive en juillet (à 2.5 %) et continue d’indiquer que d’autres hausses de taux sont à venir. Surtout, la plupart de ses membres ont indiqué que la Fed maintiendra des taux élevés dans les prochains trimestres même si l’économie ralentit, car cela prendra du temps de reprendre le contrôle sur les pressions inflationnistes. Nous pensons que la Fed devrait remonter ses taux vers les 4 % d’ici début 2023 et les maintenir élevés au moins jusqu’en 2024, ce qui est un peu supérieur aux anticipations actuelles du marché. De son côté, la BCE a remonté son taux directeur de 50pb à 0.0 % en juillet. Il s’agit de la première hausse de taux depuis plus de 10 ans et de la première fois que le taux sort du territoire négatif depuis 2014. Malgré le choc énergétique et la probable récession à venir, les membres de la BCE indiquent qu’ils souhaitent rapidement ramener les taux vers des niveaux plus neutres, que la BCE estime être entre 1 et 2 %. Par ailleurs, ils estiment que le risque d’écartement excessif des écarts de taux souverain est limité grâce à leur outil « Transmission Protection Instrument ». Nous anticipons que la BCE continuera à remonter son taux directeur de façon rapide vers les 1,5 % d’ici la fin de l’année, car elle craint le désencrage des anticipations d’inflation, ce qui est proche de ce que le marché anticipe.

Perspectives économiques et financières 2022

Nos convictions financières à un horizon de trois mois : il est encore trop tôt pour être téméraire

  • Alors qu’au début du mois, les investisseurs pouvaient espérer un « pivot » des banques centrales, les discours des deux côtés de l’Atlantique et notamment la conférence de Jackson Hole ont exclu une telle hypothèse, contribuant à effacer une grande partie le rebond de l’appétit pour le risque qui s’était opérée depuis mi-juin. Qui plus est, les perspectives s’assombrissent encore un peu plus, ce qui devrait commencer à peser sur les fondamentaux des entreprises qui sont restés solides jusque-là. Dans ce contexte, nous continuons de privilégier la prudence sur l’ensemble des classes d’actifs. Toutefois, après les baisses récentes, les marchés intègrent déjà beaucoup de mauvaises nouvelles et commencent à offrir des valorisations plus attractives, ce qui limite le potentiel de baisse et offre des perspectives plus favorables de rendement à moyen terme.
  • Notre positionnement reste négatif sur les actions. Dans un cycle économique baissier et face aux différents chocs négatifs, nous gardons un biais défensif en recherchant des valorisations raisonnables et des résultats solides. En terme géographique, nous privilégions les Etats‑Unis en relatif, car l’économie est moins exposée à la crise énergétique et à la faible demande chinoise que les marchés européens et émergents, même si les actions américaines gardent des valorisations plus élevées. En même temps, le manque d’élan de l’économie chinoise et les incertitudes sur la stratégie du gouvernement nous pousse à réviser nettement à la baisse nos attentes sur les actions chinoises.  
  • Les obligations d’Etat ont déjà fortement corrigé à la suite des déclarations dures des banques centrales, mais nous restons prudents, car les taux pourraient encore augmenter légèrement tant que les banques centrales remontent rapidement leurs taux. Même si nous sommes plus modérés que le mois dernier quant à notre positionnement, nous pensons que la volatilité devrait rester élevée et restons particulièrement prudents sur les dettes périphériques de la Zone Euro.
  • Nous repassons négatifs sur les obligations de crédit tout en conservant une approche très conservatrice et sélective dans notre gestion au vu du cadre économique très négatif pour les noms les plus fragiles. 

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