Pour réaliser des opérations de croissance externe, acquérir des actifs spécifiques ou réaliser des investissements significatifs, une entreprise peut recourir à un financement dit structuré, c’est-à-dire « un crédit syndiqué entre plusieurs banques et prêteurs institutionnels, généralement multi-tranche, régi par un contrat unique détaillant des clauses d’encadrement communes, dont des covenants financiers » résume Frédéric Vigier. Les intérêts des prêteurs étant alignés, en ce sens qu’ils sont soudés par un même financement au travers d’une documentation unique, le client peut ainsi être assuré qu’il sera accompagné dans la durée par les banques de manière réfléchie et coordonnée. Côté prêteurs, une telle structure permet une meilleure répartition du risque de défaut de paiement.
L’exemple du LBO
Le plus connu de ces financements structurés est sans nul doute le leverage buy out ou LBO, utilisé dans le cadre de l’achat d’une entreprise, via des prêts structurés associés à des tranches additionnelles : equity, obligations convertibles, dette senior, dette mezzanine. Afin de donner les moyens de son développement à l’entreprise, le dispositif peut intégrer des lignes de crédit spécifiques, comme des lignes de Capex pour des investissements productifs ou des lignes RCF pour le financement du BFR. « Les LBO restent une part importante des financements structurés : leur nombre et le volume avaient certes chuté avec la crise financière de 2008-2009, mais depuis, le marché s’est repris et reste dynamique » relate Frédéric Vigier.
Des secteurs exclus et une analyse de la stratégie
Le financement structuré est un gage fort de confiance en la stratégie de l’entreprise de la part des prêteurs. C’est pourquoi plusieurs paramètres seront étudiés. Un élément peut être discriminant : le secteur d’activité. « Au sein de La Banque Postale, pour une question de cohérence avec notre positionnement de banque citoyenne, certains secteurs d’activité sont exclus, dont ceux des jeux ou des armes ». A l’inverse, d’autres, tel le médical, sont très favorisés sur le marché, car ils portent en eux une dimension essentielle : l’innovation. « Mais c’est l’analyse de la stratégie qui importe. Le positionnement de la société est-il solide, protégé par des barrières à l’entrée du type brevets, savoir-faire, relations commerciales fortes avec des sociétés de premier rang ? » détaille Frédéric Vigier. Le positionnement est appréhendé selon une analyse SWOT. A cela s’ajoute l’étude de la stabilité des cash flows afin « de cerner le business model, en s’intéressant à la solidité et la régularité des cash flows historiques ». La qualité du management et la gouvernance sont également clés : « un directeur financier expérimenté en matière de financements structurés rassure ». L’étude des perspectives et du business plan de l’entreprise vient compléter l’analyse : « le type de projets, développement international ou acquisitions par exemple, mais aussi le rythme de ces projets comptent ».
La conduite du projet de financement
« Le point de départ est la volonté de l’entreprise de structurer son passif de manière optimale au regard de sa stratégie à moyen/long terme. Les banques peuvent être force de proposition dans la réflexion sur l’organisation de ces financements ». L’entreprise retient un ou plusieurs arrangeurs, c’est-à-dire la ou les banque(s) qui auront pour mission de conduire la négociation du financement, éventuellement prendre ferme tout ou partie de ce financement et le syndiquer ensuite auprès d’autres partenaires, voire d’organiser directement un club deal (sans engagement ferme sur le financement). Cette construction du financement présente pour l’entreprise l’avantage de mener une discussion concomitante avec l’ensemble des prêteurs via l’arrangeur (ou chef de file), ce qui lui évite des échanges multilatéraux chronophages et aux résultats hétérogènes.
« Le temps requis pour la mise en place diffère selon le type de problématique à financer et selon la maturité de l’entreprise vis-à-vis des crédits syndiqués. Un financement d’acquisition prend plus de temps qu’un refinancement de dette : le travail en amont y est plus important pour identifier tous les bons leviers. Dans certaines situations le financement syndiqué peut être opportunément complété par un Euro PP par exemple ».
Choix de l’arrangeur
Cette capacité de la banque à proposer des solutions relevant du sur-mesure au regard du projet doit guider le choix de l’entreprise vis-à-vis de l’arrangeur. Le fait qu’une banque présente de belles références en termes d’opérations est un élément important mais non suffisant. Outre la capacité à délivrer du sur-mesure, d’autres éléments sont à prendre en compte : la capacité à se mobiliser rapidement, la capacité de prise ferme du financement et l’implantation territoriale pour un suivi et un accompagnement dans la durée. Dernier conseil : « depuis près de deux ans, les financements à dimension RSE sont en forte hausse. Le financement RSE ou crédit à impact est un crédit dont le taux est partiellement indexé sur la performance extra-financière de l’emprunteur. Pour les optimiser pleinement, une entreprise a tout intérêt à s’appuyer sur un chef de file expert, tel que La Banque Postale, plusieurs fois mandatés coordinateur RSE sur des financements structurés et dont la stratégie RSE est reconnue de longue date ».
Glossaire
- Crédit syndiqué : crédit accordé à une entreprise par plusieurs banques ou prêteurs institutionnels.
- LBO ou Leverage Buy-Out : ou rachat avec effet de levier. Il s’agit d’un montage financier permettant le rachat d'une entreprise par le biais d'une société holding.
- Covenants financiers : terme désignant l'ensemble des contraintes que la société doit respecter dans le cadre d’un contrat de prêt par exemple.
- Equity : représente les apports financiers des actionnaires de l'entreprise.
- Obligation convertible : terme qui désigne le plus souvent une obligation donc une créance qui peut être convertie en actions de la société émettrice.
- Dette senior : elle se caractérise par une priorité de paiement et des garanties spécifiques par rapport à d'autres dettes dites « subordonnées » et concerne le plus souvent une dette bancaire.
- Dette mezzanine : aussi appelée « dette junior », elle est une dette subordonnée, dont le remboursement interviendra donc après celui d’une dette senior.