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Lancement du parc éolien flottant EolMed

Après l’éolien terrestre et le solaire, Qair se lance dans l’éolien flottant et la production d’hydrogène. Son projet EolMed, au large de Gruissan, dans l’Aude, alimentera 50 000 habitants en électricité dès 2024.

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Jean-Marc Bouchet a créé Qair en 2017, tout de suite après avoir vendu une première entreprise de production d’énergies renouvelables, Quadran. Son objectif : persévérer dans ce secteur en développant, au côté du solaire et de l’éolien classique, des programmes d’éolien flottant et de production d’hydrogène vert. En cinq ans, le nouveau groupe né dans l’Hérault a bien grandi. Fort de 480 collaborateurs, il est aujourd’hui présent dans 17 pays, exploite 850 mégawatts (MW) et a généré un chiffre d’affaires de quelque 77 millions d’euros en 2021. Le groupe vise 1 GW d’actifs mis en service en 2022. Engagé depuis plus de 30 ans dans la transition énergétique des territoires, Jean-Marc Bouchet partage sa vision du secteur, détaille ses projets et la façon dont La Banque Postale l’accompagne.

Portrait de Jean-Marc Bouchet

La révolution de l'énergie est bel et bien en marche.

Jean-Marc Bouchet — Cofondateur et président du conseil de surveillance de Qair.

En juin dernier, le Haut Conseil pour le Climat a estimé que l’action climatique de la France était insuffisante. Quelques jours plus tôt, le réseau international d’experts REN21 affirmait qu’au niveau mondial, la transition énergétique n’avait pas vraiment commencé. Que vous inspirent ces réflexions ?

Jean-Marc Bouchet : Il faut regarder le chemin parcouru et, moi qui travaille dans les énergies renouvelables (ENR) depuis 1988, je suis bien placé pour le mesurer. Il y a 35 ans, on n’aurait jamais imaginé produire autant d’énergie avec le soleil ou le vent. À l’époque, les éoliennes étaient des machines pour doux rêveurs, de seulement 10 mètres de diamètre. Aujourd’hui, les plus grandes atteignent 200 mètres de diamètre et peuvent produire jusqu’à 20 MW. Quant aux panneaux solaires, leurs rendements sont passés de 10 % à 25 %. Je constate aussi que le monde politique est également beaucoup plus sensible à ces enjeux qu’il y a seulement 10 ans et je peux vous assurer que la révolution est bel et bien en marche. Nous avons plus de raisons que jamais de nous montrer optimistes.

Comment la pandémie et le conflit ukrainien ont-ils affecté votre activité ?

J-M. B. : Même si la crise sanitaire a momentanément ralenti certains dossiers, elle a, au fond, contribué à accélérer la transition environnementale. La reprise économique brutale, ainsi que le conflit ukrainien, ont en revanche des conséquences sur le prix des matières premières. Les équipements de certains projets en cours de développement ont pris 20 à 30 % alors que les contrats avec les acheteurs d’énergies étaient déjà signés. Renégocier représente alors un énorme travail. Mais tout le monde est conscient des enjeux écologiques et je suis confiant sur le fait que nous trouverons des solutions.

De quelle manière choisissez-vous les sites sur lesquels vous vous installez ?

J-M. B. : Tout est histoire d’environnement et de technique adaptés. Nous avons appris à planter nos éoliennes en tenant compte des contraintes liées au paysage, à la biodiversité ainsi que des opinions des habitants. Après une première réflexion pour déterminer les meilleurs endroits, nous rencontrons les élus des territoires concernés. On évoque avec eux les pistes possibles puis nous choisissons collectivement les emplacements. Le projet évolue sous diverses facettes avant d’arriver aux premières esquisses, qui sont alors confrontées aux environnementalistes et au public.

Quels projets menez-vous en France ?

J-M. B. : Le principal se nomme EolMed. Il consiste à dresser des éoliennes, installées sur des caissons métalliques flottants et ancrés au fond de la mer, à plus de 18 km au large de Gruissan, dans l’Aude. Ce parc d’une puissance totale d’environ 30 MW permettra de produire près de 100 millions de kWh par an, soit de quoi satisfaire la consommation électrique annuelle de 50 000 habitants. L’objectif, que nous partageons avec la Région Occitanie, est de créer une filière locale. Les flotteurs sont construits à Port-La Nouvelle par des entreprises de la région. Nous avons embauché sur place 20 ingénieurs et nous allons y créer 300 000 heures de chantier. L’équipe d’exploitation sera, elle, composée d’une dizaine de personnes. Les flotteurs seront mis à l’eau à l’été 2024. Le contrat d’exploitation durera 20 ans.

Comment financez-vous une telle opération ?

J-M. B. : Son budget global se monte à environ 300 millions d’euros. 60 M€ proviennent de nos fonds propres, 78 M€ d’avances remboursables et de subventions de l’État et 165 M€ d’emprunts à long terme, rendus possibles parce que la production d’énergie engendre un cash-flow prévisible. À l’époque de Quadran, La Banque Postale était l’un de nos principaux partenaires. Elle était venue nous rencontrer en expliquant qu’elle souhaitait nous accompagner dans le financement des ENR et cela avait été une heureuse surprise. Nous avons rencontré des professionnels motivés, compétents, avec lesquels nous avons mené de belles réalisations. Lorsque nous avons commencé à travailler sur EolMed, mes équipes ont d’abord cherché des financements au Japon, en Espagne, dans des pays rompus à l’éolien offshore. Je leur ai plutôt recommandé de s’adresser aux partenaires que l’on connaissait et en qui nous avions confiance ! Nous avons donc proposé à La Banque Postale de participer, puis de prendre la tête d’un groupe de banques qui a financé la moitié du prêt, l’autre étant accordée par la Banque européenne d’investissement.

Sur quelles autres énergies renouvelables travaillez-vous ?

J-M. B. : En France, nous nous intéressons de près à l’hydrogène vert. Une unité de production de grande capacité - jusqu’à 15 tonnes par jour - est ainsi en cours d’autorisation administrative, toujours à Port-La-Nouvelle. Ce lieu stratégique présente en effet plusieurs atouts : la proximité avec les éoliennes offshore, la qualité de ses infrastructures maritimes, les modes de stockage locaux qui s’annoncent prometteurs, ainsi que la proximité des réseaux ferroviaires et autoroutiers. Nous visons 20 % de part de marché en Occitanie à l’horizon 2050. Et là encore, nous avons bien l’intention d’avancer avec La Banque Postale

Portrait d'Emmanuel Esneu

« La Banque Postale est une des toutes premières banques à avoir abandonné le financement des énergies fossiles pour se concentrer sur les énergies renouvelables. En accompagnant le groupe Qair dans son projet d’éoliennes flottantes, elle œuvre à son objectif majeur : la transition juste. Nous visons les 3 milliards d’euros d’encours dans la transition énergétique d’ici fin 2023, nous soutenons également le développement des territoires et entendons favoriser les créations d’emplois en région. Chaque année, 85 % des sommes que nous investissons le sont dans des projets soutenant la transition écologique ou à visée sociale. Nos spécialistes sont en pointe sur les problématiques opérationnelles. Nos clients nous disent d’ailleurs souvent que nous parlons le même langage qu’eux, ce qui est le meilleur des compliments. Nous leur offrons des prestations techniques de premier plan : arrangement et gestion des financements, capacité à mobiliser de nombreux investisseurs ainsi que l’épargne de nos clients. Avec, à chaque fois, la volonté d’innover. »

Emmanuel Esneu — Directeur des financements d'actifs et de projets à La Banque Postale

Source : magazine Le Point en date du 6/10/2022.

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