Des tendances comme la digitalisation, l’instantanéité, ou l’API, ou des offres telles que l’IBAN virtuel, l’omnicanalité, l’initiation de virement, l’orchestration des paiements et prochainement Wero : les innovations du transaction banking sont nombreuses et somme toute récentes. Quelles sont celles qui ont d’ores et déjà séduit les entreprises et pourquoi ? Quelles sont celles dont le potentiel est encore méconnu ? Et qu’est-ce que Wero, la solution européenne de paiements, va changer ? Les réponses de Marouane Benjenna, directeur adjoint de l’offre produit Transaction Banking de La Banque Postale.
L’acceptation omnicanale est une dynamique que l’on retrouve essentiellement dans le BtoC et plutôt dans les grandes entreprises mais qui tend à se démocratiser.
Marouane Benjenna — Directeur adjoint de l’offre produit Transaction Banking de La Banque Postale et directeur général eZyness
Au regard de votre expérience, quelles sont les tendances du transaction banking les mieux connues des entreprises ?
Marouane Benjenna : « Sans hésitation aucune, je mets à la première place la digitalisation et ses deux catalyseurs : l’instantanéité et la technologie API*$ pour la partie encaissement. C’est un tout qui multiplie les échanges en temps réel et les voies de communication. Et qui ouvre de nouveaux besoins, car le client final veut pouvoir payer quand il veut, où il veut et comme il le veut. Cette exigence se répercute sur toute la chaine de valeur puisque cela transforme aussi la manière d’encaisser. La crise sanitaire a fortement accéléré la diffusion de cette tendance très présente dans le BtoC, car elle permet l’émergence de marketplaces, de parcours client avec mutualisation d’achats de paniers. Mais le BtoB est aussi très demandeur. La digitalisation par le biais de la technologie API ouvre la possibilité pour une entreprise de valoriser sa base clients. Cela se voit beaucoup dans la grande distribution, où les sociétés ont souvent une activité en propre et une activité pour le compte tiers.
Le triptyque digitalisation/ instantanéité/API est de plus poussé par la réglementation : on le voit bien avec le virement instantané qui devient la norme en Europe. Donc oui, la digitalisation/ API est selon moi l’innovation la mieux connue et la plus répandue au sein des entreprises. Mais elle nécessite une sécurité renforcée : le secteur bancaire français - et particulièrement La Banque Postale - le fait.
API ou interface de programmation d'application. Une API est un ensemble de définitions et de protocoles qui facilite la création et l'intégration des applications.
Si la digitalisation couplée à l’instantanéité et à la technologie API est à la première place, quelles innovations complètent le podium ?
L’acceptation omnicanale et l’IBAN virtuel sont deux autres innovations du transaction banking en matière d’encaissement très répandues, mais avec une prééminence sectorielle marquée pour la première. L’acceptation omnicanale, soit le croisement de canaux où l’acte d’achat débute sur l’un et se finit sur un autre, a un impact profond sur le business model de l’entreprise qui l’adopte. On a vu d’ailleurs durant la crise sanitaire foisonner les “click and collect“ et “ web to store“. C’est une dynamique que l’on retrouve essentiellement dans le BtoC et plutôt dans les grandes entreprises mais qui tend à se démocratiser. L’apport du transaction banking est de proposer des solutions pour mettre en place ce type de parcours avec une vision à 360° de l’activité.
L’IBAN virtuel est une autre innovation qui a marqué les esprits mais qui surtout simplifie le quotidien des entreprises. Apparu il y a environ trois ans sur le marché, l’IBAN virtuel répond en effet à différents enjeux opérationnels. Il permet d’abord à une entreprise de mieux maitriser son process d’encaissement par virement. C’est d’ailleurs cette facilitation du rapprochement comptable qui déclenche généralement l’intérêt de nos clients. Ce rapprochement comptable facilité favorise aussi une expérience client optimisée : les mises en demeure de paiement non fondées sont évidemment moindres. L’IBAN virtuel permet enfin de sécuriser l’activité : on ne communique plus à tous les intéressés le même IBAN, celui du compte bancaire mais on crée un IBAN par type d’opérations ou besoin spécifique. C’est un apport qui a trouvé un vrai intérêt face au développement des fraudes par piratage de données.
À l’inverse, quelles sont les innovations du transaction banking dont les entreprises ne se sont pas encore vraiment emparées selon vous ?
D’abord l’initiation de virement comme moyen d’encaissement. Ce qui est logique puisque c’est un sujet récent et sur lequel il n’y a pas encore de solution paneuropéenne. Il commence à prendre de la place, en particulier au sein des entreprises pour lesquelles le virement est un mode de règlement important. L’initiation de paiement par virement présente de nombreux avantages : c’est un mode de paiement supplémentaire proposé au client final et qui, tout en étant très sécurisé, rend possible, avec l’option virement instantané, un encaissement plus rapide pour l’entreprise. C’est donc un vecteur d’optimisation de la trésorerie.
Une autre innovation encore peu utilisée par les entreprises est l’orchestration des paiements. Pour l’heure, les moyens de paiements sont encore très silotés puisque la démarche la plus fréquente est l’ajout successif de moyens de paiements. Il y a beaucoup à gagner, sur la prévisibilité de trésorerie par exemple, si l’on s’appuie sur une solution d’orchestration des flux d’encaissement et de décaissement.
Quelle innovation à venir va selon vous bouleverser la partie encaissement du transaction banking et donc la vie des entreprises dans leur relation avec leurs clients et leurs banques ?
Sans doute la solution européenne de paiements Wero, pensée pour répondre à un enjeu de souveraineté des paiements au sein de l’Union européenne. Très schématiquement, Wero utilise l’Open Banking*$ et le mixe avec des fondamentaux de l’initiation de paiement par virement et de la carte bancaire. Dans un premier temps, il concernera les transferts de particulier à particulier et dans un second temps, entre particuliers et professionnels. À terme, via son extension au paiement en ligne et en magasin, c’est toute la façon de traiter de bout en bout le paiement qui sera chamboulée que ce soit pour les entreprises ou les établissements financiers. »
Pour en savoir plus sur ce sujet, « Paiements en Europe : Le lancement de Wero en France doit débuter fin juin », entretien avec Martina Weimert, directrice générale de l’European Payment Initiative (EPI) paru sur la Tribune (lien accessible pour les abonnés).
L’open banking est un cadre technologique destiné aux systèmes bancaires qui facilite le partage sécurisé des données entre les institutions financières et les fournisseurs tiers autorisés, grâce à des API sécurisées.