Interview

Les enseignements du baromètre France générosités : comment recruter de nouveaux donateurs ?

Parue en mai 2022 avec le soutien de La Banque Postale, la nouvelle édition du Baromètre France générosités confirme plusieurs tendances dont la hausse des dons en 2021 (+ 4,5 % par rapport à 2020) et le recul des nouveaux donateurs (- 9 % en 10 ans). Échange avec Nolwenn Poupon, Directrice Études et Communication au sein de France générosités afin de comprendre comment les associations et les fondations peuvent renverser cette dernière tendance.

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Portrait de Nolwenn Poupon

Le premier paramètre dont il faut tenir compte est qu’il y a autant de motivations aux dons que de donateurs. Cela va de l’intérêt général à une cause particulière ayant une résonance personnelle en passant par une tradition familiale, une dimension cultuelle, la volonté de faire partie d’un groupe ou encore la quête de sens.

Nolwenn Poupon (©Antoine Thibaud) — Directrice Études et Communication au sein de France générosités

Dans quel contexte une association doit-elle inscrire sa stratégie de recrutement de nouveaux donateurs ?

Puis il faut se souvenir que pour donner, il faut bien souvent avoir reçu une sollicitation. Le don spontané est rare. Le traitement médiatique en fait la démonstration. Les causes médiatisées, telle que l’Ukraine, génèrent une générosité conséquente. Or, pour une telle mise en lumière, la proximité culturelle joue beaucoup comme l’ont montré les inondations de 2010 au Pakistan. Elles ont fait l’objet d’un fort relais médiatique au Royaume-Uni du fait des liens entre les deux pays mais très peu en France. Plus largement, les associations manquent de moyens pour construire leur mise en valeur médiatique.

Face à ces contraintes, il y a deux leviers à fort potentiel. D’abord le fait qu’à partir du moment où il y a un premier don, la relation créée est le plus souvent régulière. Ensuite, la montée en puissance du prélèvement automatique qui permet aux associations de disposer d’une vision budgétaire annuelle et limite le risque d’oubli du fait de sa récurrence.

Dans une approche par tranche d’âge, où réside le plus grand potentiel de conversion non-donateurs/néo-donateurs ?

Nolwenn Poupon : La classe d’âge qui donne le moins est celle des 30- 50 ans, c’est-à-dire les actifs qui ont à la fois à gérer famille et travail et qui sont donc happés par leur quotidien et souvent contraints financièrement. C’est pourquoi dans les huit propositions que nous avons portées dans le cadre de l’élection présidentielle, nous avons souligné la nécessité de faciliter les dons de jours de congés à une association et une fondation. Car c’est indolore d’un point de vue pécuniaire pour les donateurs et fédérateur pour les entreprises. Cette possibilité existe si et seulement si l’entreprise dispose d’un compte épargne temps et elle nécessite un cadre légal plus abouti pour être pleinement utilisée.

Il y a aussi nécessité de développer dès le plus jeune âge une culture de l’engagement, à l’instar de ce qui se fait dans le système éducatif des pays anglo-saxons et aux États-Unis.

À ce titre, ce que propose l’association « L’école de la philanthropie » est très construit, très intéressant. Mais cela reste marginal.

L’approche par tranche d’âge n’est pas la seule à envisager : il faut aussi penser une approche par communauté avec le gaming, les réseaux sociaux ou encore les cryptomonnaies.

Parmi les obstacles aux dons, la difficulté à faire le lien entre une cause et une association et le manque de confiance reviennent souvent. Quelles réponses apporter ?

Nolwenn Poupon : En faisant connaitre la plateforme Infodon.fr, que nous avons lancée avec le soutien de La Banque Postale. Elle renseigne sur toutes les formes de générosité et met en relation les futurs donateurs avec les associations et fondations. D’où notre partenariat avec le Conseil supérieur du notariat. Face à un testateur désireux de faire un don via son testament mais sans savoir à qui ou quoi, le notaire ne peut pas déontologiquement le conseiller, le guider. Mais il pourra l’orienter vers cette plateforme pour éclairer son choix.

Quant au manque de confiance, il s’explique par le syndrome du scandale de l’ARC qui a percuté tout le secteur. Il faut rappeler qu’une association ou une fondation est soumise à plus de contrôles et de contraintes qu’une entreprise si elle fait appel à la générosité publique. La Cour des comptes et l’IGAS peuvent procéder à des contrôles et audits tout comme les bailleurs de fonds publics. Le secteur lui-même a mis en place des procédures d’audit interne, des labels pour rassurer et travailler en transparence. Nous sommes enfin confrontés à des obligations légales -avec la loi sur le séparatisme- et fiscales, qui ne cessent de se complexifier, ce qui induit des coûts de gestion et de traitement supplémentaires. Et double peine, en France, toute évolution de ces coûts entraîne une suspicion de mauvaise gestion, alors qu’elles sont mises en place pour rassurer les donateurs. Sur ce point aussi nous pouvons apprendre des pays anglo-saxons.

Pour en savoir plus : lire le Baromètre France générosités 2021, paru en mai 2022, réalisé en partenariat exclusif avec La Banque Postale.

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