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Crise des métiers, pénurie de personnels : un congrès FEHAP 2022 sous pression

Les 16 et 17 novembre 2022, la fédération de référence des acteurs privés solidaires du secteur sanitaire, social et médico-social se réunit en congrès, à Bordeaux. Sur le thème « Les engagés  », ce rassemblement est notamment l’occasion d’évoquer de possibles solutions face aux difficultés de recrutement et à la perte d’attractivité des métiers du secteur. Une problématique sans précédent par son ampleur qui pousse les structures à innover.

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Pénurie de personnels de santé

Le manque d’attractivité des métiers de la filière médico-sociale n’est pas une problématique nouvelle. En 2019 déjà, le rapport El Khomri s’en alarmait. Mais loin de résorber ces tensions, la crise sanitaire les a accentuées.

En janvier 2022, à la veille de la Conférence nationale des métiers de l’accompagnement social et médico-social voulue par le Président de la République, la FEHAP a ouvert le débat, en publiant une étude avec Nexem, principale organisation professionnelle représentative des employeurs du secteur social, médico-social et sanitaire privé à but non lucratif. Un « éclairage national, objectivé et qualitatif, sur les difficultés de recrutement et les métiers en tension », qui analyse la situation dans les établissements et services privés non lucratifs représentés par les deux organisations, du 1er juin au 30 septembre 2021.

Le constat : un déficit d’attractivité des métiers du « care »

Des difficultés de recrutement

Actuellement, en France, 50 000 postes sont à pourvoir dans les établissements et services du secteur social, médico-social et sanitaire, public et privé confondus. Si ces besoins ne sont pas nouveaux, ils tendent à s’amplifier. Près de 150 000 postes seraient à pourvoir d’ici 2025, soit près d’un quart des emplois actuels du secteur.

Ces tensions touchent toutes les filières et toutes les professions, et les revalorisations salariales accordées dans le cadre du Ségur de la santé n’ont pas inversé la tendance. Elles s’observent particulièrement parmi les professionnels de l’accompagnement et du soin.

Trois catégories de métiers sont plus fortement concernées par les vacances de postes :

  • le personnel soignant et de rééducation (infirmier, aide-soignant…),
  • le personnel éducatif et social,
  • les médecins.

Plus de la moitié des répondants à l’étude mettent en avant des difficultés de recrutement aggravées au cours du troisième trimestre 2021.

Des départs non maitrisés

36 000, c’est le nombre de départs de salariés, évalué à partir des départs constatés dans l’échantillon interrogé par la FEHAP, pour le secteur social, médico-social et sanitaire privé non lucratif sur la seule période du 1er juin  au 30 septembre 2021.

Plus de la moitié de ces départs sont volontaires, par démission ou rupture conventionnelle.

Des répercussions sur les publics accueillis

Tous les publics accompagnés dans le secteur sanitaire, social et médico-social sont impactés par cette crise des métiers : patients, personnes en situation de handicap, personnes âgées dépendantes, enfants et jeunes en difficulté, majeurs protégés, personnes et familles en précarité sociale etc. « Les tensions sont telles » estime la FEHAP, « qu’elles mettent en difficulté les structures pour assurer un accompagnement de qualité ».

Des conditions de travail dégradées

Les métiers du soin et de l’accompagnement subissent donc des situations permanentes de sous-effectifs.

En cause, un manque de reconnaissance des professionnels, la pénibilité du travail, des carrières trop peu attractives, des conditions de travail dégradées, mais aussi une crise de sens plus globale, liée à la place accordée à ces métiers dans notre société. En amont, les formations spécialisées ne font plus le plein.

Les leviers actionnés : les revalorisations ne suffisent pas

La revalorisation salariale de 183 euros nets par mois, initialement consentie au profit des personnels soignants et accompagnants des établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux (ESSMS), a été progressivement étendue aux professionnels de l’aide à domicile et de la filière socio-éducative. Soit un ensemble de métiers en tension, dont sont néanmoins exclus les « oubliés du Ségur », comme les agents des fonctions techniques, logistiques ou administratives, ou encore les écoutants du Samu Social et du 3919, numéro national d’urgence pour les femmes victimes de violence.

La revalorisation du point d’indice dans la fonction publique (de +3,5%, à compter du 1er juillet 2022) est un second geste positif – quoique partiel - en faveur de l’attractivité des professionnels du secteur public.

Mais l’enjeu de l’attractivité des métiers du « prendre soin » ne se limite pas à la problématique de la rémunération.

Du fait de sa difficulté à attirer et fidéliser des professionnels, le secteur « commence à donner des signes de fragilité structurelle », estiment conjointement la FEHAP et Nexem. Le recours à l’intérim, ou encore l’embauche de personnes non diplômées, formées sur le tas, permettent de réguler une partie des tensions. Mais elles ne pallient pas totalement les absences. La pénurie chronique de personnels dans les établissements et services expose les équipes à une charge de travail alourdie,  au risque d’une dégradation supplémentaire des conditions de travail. Certains établissements et services se résolvent à geler, voire fermer des lits et des places.

Parallèlement, des chantiers relatifs aux perspectives de carrière, à la formation et à la gestion des compétences, à la qualité de vie au travail ou encore au lien vie privée / vie professionnelle s’invitent à l’ordre du jour. Soutenu par la FEHAP, le projet d’un nouveau cadre conventionnel dans la branche du secteur sanitaire et social, avec l'objectif de négocier une convention collective unique étendue, ne fait pas l’unanimité.

Nombre d’acteurs misent enfin sur l’apprentissage, pour motiver davantage de jeunes à s’investir professionnellement dans le secteur.

Un « vivier » de demandeurs d’emploi pour pallier les pénuries

Face à la volumétrie des besoins non couverts, Pôle Emploi a lancé, à la rentrée 2022, un plan inédit, baptisé « Tensions 2022 », afin de créer un vivier de demandeurs d’emploi susceptibles de s’engager « immédiatement ou moyennant une adaptation rapide » dans 3 secteurs faisant face à d’importants besoins de recrutement non couverts, dont le sanitaire et le social(1). Dans 23 métiers en tension identifiés – parmi lesquels ceux d’infirmier, aide-soignant ou auxiliaire de vie – Pôle Emploi s’est appuyé sur les fédérations d’employeurs pour identifier les savoir-faire et savoir-être indispensables à l’exercice immédiat du métier ou pouvant être acquis rapidement. Les demandeurs d’emploi inscrits depuis moins de 3 mois sont prioritairement ciblés.

Le dispositif, territorialisé, fait l’objet d’un partenariat national avec AXESS (confédération d’employeurs de la branche professionnelle du social, médico-social et sanitaire) dont la FEHAP fait partie. Cette coopération doit faciliter le partage de données, l’orientation des demandeurs d’emploi, l’accompagnement des recrutements et le renforcement des démarches d’inclusion.

Cela, dans un contexte où, estime la FEHAP, chaque établissement compte en moyenne 5 postes vacants.

L'engagement au programme du Congrès FEHAP

Les 16 et 17 novembre 2022 à Bordeaux, le Congrès FEHAP annonce clairement la couleur. Sur le thème « Les engagés », le rassemblement des acteurs privés solidaires du secteur médico-social ouvre le débat et multiplie les angles d’attaque.

Au programme du Congrès 2022 figurent plusieurs tables-rondes thématiques pour nourrir la réflexion et la capacité à agir des participants :

  • « S’engager pour améliorer les conditions de vie au travail, un levier de fidélisation des professionnels »,
  • « Vers une nouvelle convention collective unique étendue »
  • « Comment susciter, entretenir et reconnaître l'engagement dans son milieu professionnel ? »
  • « Où en est-on aujourd’hui sur l’apprentissage dans le secteur privé solidaire »
  • « L’engagement, un mode de management propre au Privé non lucratif ? »
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(1) Sont également concernés l’Hôtellerie-restauration et les Transports.