La fin 2020 et le premier semestre 2021 ont constitué « le moment américain », selon Alain Henriot, du fait de la hausse de revenus des ménages liée à un fort soutien budgétaire : les ménages ont épargné pour une bonne part ce surcroît de revenu, mais ils ont aussi consommé. « Puis, le marché du travail s’est redressé ». A la même période, l’Europe était dans une situation compliquée, du fait des contraintes liées aux différentes phases épidémiques : « le PIB a baissé en Allemagne au premier trimestre 2021. Depuis, la reprise est belle. Cette dynamique s’est construite en deux temps : l’industrie a bénéficié de la reprise mondiale portée par la Chine puis les Etats-Unis, et, au printemps 2021, la reprise est intervenue dans les services ».
Une reprise soudaine et ample dont le pic se situe au début de l’été 2021
Les dernières données mondiales des enquêtes de conjoncture de juillet et août montrent un effritement de la croissance. « Cette inflexion permet de situer le pic de croissance au début de l’été 2021 ». De fait, le rattrapage est opéré en Chine ; aux Etats-Unis, le PIB au 2ème trimestre 2021 était déjà supérieur à celui de fin 2019 ; et en Europe, le taux de chômage est revenu au niveau de fin 2019. « La trace de la crise est presque effacée même si l’on observe des différences : en Europe on a retrouvé le niveau d’emploi d’avant-crise, mais pas encore le niveau de PIB, alors que c’est l’inverse aux Etats-Unis ».
Cette reprise se caractérise par « sa soudaineté et son ampleur, portées par les divers plans de relance ». Deux facteurs qui entrainent naturellement des tensions dans la sphère industrielle, en termes d’approvisionnements, particulièrement pour les composants. « Outre la production, c’est aussi l’embouteillage dans le transport maritime qui génère ces tensions, lesquelles touchent particulièrement le secteur automobile ». Et cette pénurie, à laquelle s’ajoute la hausse des prix des matières premières, explique aussi le niveau élevé de l’inflation.
Si la quatrième vague épidémique n’a pas donné lieu aux mêmes contraintes sanitaires et donc économiques que les précédentes, elle a toutefois « généré de l’inquiétude chez les investisseurs et chefs d’entreprise, d’autant que certains secteurs ne sont pas revenus à la normale, par exemple le transport aérien ».
Une décélération logique et qui ne doit pas inquiéter
Ces différents éléments – tensions des approvisionnements industriels, inflation élevée, frilosité des investisseurs, retard de certains secteurs – doivent-ils inquiéter ? « Non, selon Alain Henriot, car l’essentiel du rattrapage est fait et la croissance mondiale 2021 sera supérieure à 2019, même si le pic de croissance est passé ». Et l’expert de poursuivre : « Certes une décélération va intervenir : la croissance 2022 sera importante mais moindre que celle de 2021 et l’on reviendra progressivement à la croissance tendancielle que l’on avait avant la crise ».
Une dynamique que l’on observe déjà en Chine : « la croissance de ce pays peut être qualifiée de décevante depuis le début d’année. Cela s’explique par la logique de retour à la croissance tendancielle. Mais d’autres facteurs sont aussi intervenus. Sa croissance en 2020 reposait en grande partie sur le fait que les économies des autres pays étaient à l’arrêt, ce qui n’est plus le cas en 2021. De plus les Chinois sont très frappés par les difficultés d’approvisionnements. Des difficultés sans nul doute temporaires, mais dont le terme est difficile à définir. D’autres facteurs, temporaires eux aussi, ont joué pour expliquer cette croissance décevante en Chine, par exemple les fortes contraintes sanitaires dans certaines régions cet été et des inondations très importantes en août ».
À noter
Un point d’alerte relevé par Alain Henriot concerne les pays émergents d’Asie : en effet, les Indices de climat des affaires PMI placent le Vietnam, Malaisie ou encore l’Indonésie en bas de leur classement. « Leur dynamique économique n’est pas encourageante ».