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Hausse du taux du Livret A : quel impact pour les bailleurs sociaux ?

La hausse du taux de rémunération du Livret A, de 2 % à 3 % en une année, est une bonne nouvelle pour les épargnants. Mais qui n’est pas sans conséquences pour la construction et la rénovation de logements sociaux. D’où la décision de l’État de ne pas appliquer une formule de calcul qui aurait trop pénalisé les organismes de logement social. Explications.

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Avec quelque 56 millions de titulaires et 2 millions d’ouvertures pour la seule année 2022, le Livret A est le bas de laine préféré des Français, juste derrière l’assurance-vie. Un produit d’épargne réglementé emblématique, souvent associé à des événements de vie particuliers : naissance, entrée dans l’âge adulte, mariage, héritage…

On le sait moins, mais 60 % de l’encours global du Livret A sont collectés par la Caisse des Dépôts et Consignations, qui est tenue de les réinvestir dans des projets d’intérêt général. Dont la construction et la rénovation de logements sociaux, sous forme de prêts à long terme aux bailleurs sociaux. Or ces emprunts sont consentis à des taux variables, indexés sur celui du Livret A.

Avec 150 milliards d’euros d’encours de dette soumis à ces variations, les organismes HLM sont donc très exposés à la hausse du taux de rémunération du Livret A. L’Union Sociale pour l’Habitat, organisation représentative du secteur HLM, estime ainsi à 3,75 milliards d’euros (en année pleine) le montant des charges supplémentaires pesant sur les résultats d’exploitation et les capacités à investir des organismes de logement social, du fait du passage du taux du Livret A de 0,5 % à 3 %. Cela, dans un contexte déjà peu favorable, où pèsent la hausse de l’inflation ainsi que celle du coût des matériaux et de l’énergie.

Une hausse contenue

Le taux appliqué au Livret A est de 3 % depuis le 1er février 2023. Inédit depuis 2009, ce taux reste toutefois largement inférieur à l’inflation (qui a atteint 5,2 % en moyenne en 2022 selon l’Insee). Depuis 2020, le taux du Livret A n’a de fait « plus vocation à couvrir celui de l’inflation », avait alors annoncé le ministère des Finances au moment d’abaisser celui-ci à son plus bas niveau historique.

Le taux du Livret A est réévalué deux fois par an, suivant un calcul qui intègre l’indice des prix à la consommation, mais aussi le taux interbancaire de la zone euro, auquel les banques se prêtent entre elles à court terme.

Suivant cette formule de calcul, le taux du Livret A applicable au 1er février 2023 aurait dû ressortir à 3,3 %. Suivant les recommandations de la Banque de France, qui préconisait le 13 janvier 2023 de préserver un bon équilibre entre une juste rémunération de l’épargne populaire et la préservation d’un coût de financement raisonnable pour l’économie, le gouvernement a tranché en faveur d’une légère sous-revalorisation.

Le secteur HLM, par la voix de l’USH, a pris acte d’une « décision équilibrée », qui préserve la rémunération des épargnants sans entraver trop lourdement la capacité d’investissement des organismes HLM. « Cela est essentiel », dixit Emmanuelle Cosse, présidente de l’USH, « car à travers la capacité des organismes Hlm à faire face au coût de leur dette, c’est la question de leur capacité à répondre à la demande de logement social et au développement des territoires et de l’emploi qui est posée. » Et l’USH de rappeler que 2,1 millions de familles restent en attente d’un logement social en France.

Un ralentissement de la construction HLM

La construction de nouveaux logements sociaux marque le pas depuis 2016. Dans son rapport annuel sur le mal-logement, publié le 1er février 2023, la fondation Abbé Pierre relève d’ailleurs, avec 378 000 constructions en 2022, « un ralentissement général de la construction de logements en France ». Pour la fondation, « La raison principale tient à la réduction des capacités financières des organismes Hlm, provoquée par les mesures d’économie adoptées au cours du précédent quinquennat, qui amputent les ressources des organismes. »

Dans un communiqué de janvier 2023, l’USH appelle d’ailleurs le gouvernement à considérer l’évolution de l’ensemble des paramètres financiers pesant aujourd’hui sur l’économie du logement social et entravant sa capacité d’investissement. Parmi les mesures incriminées, la baisse des APL, dont le coût est assumé par les bailleurs sociaux, la chute de 23 % des aides publiques au secteur entre 2014 et 2020, mais aussi le relèvement du taux de TVA sur les constructions neuves. Soit, estime l’USH, près de 3 milliards d’euros de prélèvements sur les fonds propres des organismes, qui restreignent leurs possibilités d’investissement.

La Banque Postale accompagne huit bailleurs sociaux sur dix. À noter néanmoins que si 80 % des prêts accordés aux bailleurs sociaux le sont par la Caisse des Dépôts et Consignations ou Action Logement, les 20 % restants sont financés par les banques commerciales. Au premier rang desquelles La Banque Postale, qui est restée en 2022, le partenaire bancaire de référence auprès des organismes de logement social.

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