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Nouvelle stratégie décennale : la lutte contre le cancer change d’échelle

Après trois plans cancer successifs, la nouvelle stratégie décennale annoncée le 4 février 2021 imprime un nouvel élan à la lutte contre le cancer. L’envergure des ambitions poursuivies est saluée par tous les acteurs du secteur comme un signal fort.

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Un contexte fortement marqué par le COVID-19

Retards au diagnostic, traitements décalés, patients tardant à venir à l’hôpital… La crise sanitaire du COVID-19 a, par rebond, affecté toute la filière de prise en charge du cancer. Le nombre de nouveaux diagnostics a ainsi diminué de 6,8% dans les centres de lutte contre le cancer au cours de l’année 2020. Pour l’ensemble des patients concernés par le cancer, la chute des diagnostics aurait atteint 23,3% sur la période(1).

Très logiquement, il s’est ensuivi un fort déclin des activités chirurgicales en oncologie : -10% par rapport à l’attendu pour le cancer du poumon, soit 1000 interventions ajournées. De quoi s’attendre à une surmortalité par cancer dans les prochaines années. Suivant les conclusions d’une récente méta-analyse(2) passant en revue toutes les études publiées entre 2000 et 2020 sur l’impact des retards de diagnostic sur la mortalité, le nombre de décès augmenterait de 6% dans les années à venir pour chaque mois de retard de diagnostic pour les cancers du sein, du côlon, de la vessie, de la prostate, du poumon et de la sphère ORL.

La pandémie a eu un autre effet pervers : entre janvier et mai 2020, le nombre de nouveaux essais cliniques en oncologie a chuté de 60%. Le développement de nouveaux médicaments pourrait s’en trouver durablement perturbé.

Mais la crise a aussi produit des effets bénéfiques. Elle a ainsi favorisé la mise en place de prises en charge coordonnée des patients à l’échelle d’un territoire donné.

Une ambition unanimement saluée

La nouvelle stratégie décennale de lutte contre le cancer rompt avec l’échelle de temps des trois plans cancers successifs, d’horizon quinquennal. Depuis 2003, ces plans ont permis certaines avancées, notamment sur la consommation d’alcool et de tabac, la transformation de l’alimentation, de l’activité physique et sportive. En accélérant le mouvement impulsé, la nouvelle stratégie de lutte entend donner de la visibilité aux acteurs, permettre de nouveaux paris, promettre davantage d’innovations de rupture et des transformations plus profondes.

La première feuille de route pour 2021-2025 bénéficie de 1,7 milliard d’euros de budget, soit 20% de moyens financiers de plus que le dernier plan cancer. 50% de cette enveloppe revient à la recherche. 65 mesures seront mises en œuvre dès 2021.

Les objectifs poursuivis sont d’envergure. Il s’agit notamment de réduire de 60 000 cas par an le nombre de cancers évitables à horizon 2040. Mais aussi de passer de 9 à 10 millions de dépistages réalisés chaque année en 2025. Ou encore de réduire de 2/3 à 1/3 la part des patients continuant de souffrir de séquelles 5 ans après leur diagnostic initial. Et enfin d’améliorer significativement les chances de survie des patients atteints de cancers de mauvais pronostic.

La stratégie décennale contre le cancer va bénéficier d’une gouvernance élargie, avec un comité de suivi national composé notamment de directeurs d’hôpitaux et d’élus locaux.

Elle s’inscrit en complémentarité avec le plan européen pour vaincre le cancer, annoncé quelques jours plus tôt. Un plan de 4 milliards d’euros centré sur la prévention, la détection précoce, le diagnostic et le traitement, ainsi que l’amélioration de la qualité de vie des patients.

Quatre axes d’action pour la nouvelle stratégie décennale contre le cancer

Axe 1 : améliorer la prévention

Le choix est fait d’une approche populationnelle, par facteur de risques, qui actionne tous les leviers permettant de modifier les comportements. La réduction du tabagisme et de la consommation d’alcool reste une priorité absolue pour diminuer les risques de cancer évitables. Un accent nouveau est porté sur les risques environnementaux, en ciblant en particulier les « effets cocktail ». Pour dépister plus et mieux, des évolutions organisationnelles et technologiques sont en ligne de mire, pour un dépistage de précision, plus personnalisé.

Axe 2 : la réduction des séquelles et l'amélioration de la vie des personnes malades

Cet objectif sera désormais pris en compte dans l’évaluation des médicaments et dispositifs médicaux. Le vécu des patients en traitement et leurs séquelles seront plus systématiquement recueillis et analysés, et feront l’objet d’un meilleur suivi coordonné, entre hôpital et médecine de ville. Un programme de désescalade thérapeutique sera initié. Un meilleur accompagnement du retour à l’emploi, prenant en compte la chronicisation de la maladie, sera développé.

Axe 3 : lutter contre les cancers de mauvais pronostic

Les soins feront l’objet d’une attention soutenue, avec la volonté d’offrir aux patients des parcours plus fluides, réduisant les délais d’accès au diagnostic et aux traitements. Des réseaux d’excellence seront mis en place autour des cancers de mauvais pronostic, avec des centres de recherche spécialisés, des centres experts pour la prise en charge et un accès élargi aux traitements innovants.

Axe 4 : des progrès qui bénéficient à tous

L’accent est porté sur le continuum recherche-soins, pour un accès plus rapide aux résultats de la recherche. La stratégie prévoit une mobilisation renforcée autour des cancers de l’enfant, de l’adolescent et du jeune adulte. Et une attention particulière portée à la réduction des inégalités sociales et territoriales.

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