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L’Ancols publie ses recommandations sur l’obligation de regroupement des bailleurs sociaux

Quatre ans après que la loi Elan a institué une obligation de regroupement des bailleurs sociaux gérant moins de 12 000 logements sociaux, l’Agence nationale de contrôle du logement social (Ancols) a publié un premier rapport de contrôle. Et formule des recommandations pour faciliter le suivi des organismes par les pouvoirs publics.

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Favoriser une meilleure allocation des investissements, réduire les risques, professionnaliser le secteur par une montée en compétences, permettre de réaliser des économies d’échelle : l’obligation de regroupement faite aux organismes de logement social est censée initier une spirale économiquement vertueuse. Mais qu’en est-il exactement ? Et où en est le secteur dans l’application de la loi ?

Dans un rapport publié au mois de décembre 2022, l’Ancols établit un premier contrôle de l’application effective de cette obligation. Au regard des objectifs poursuivis par le législateur, - qui souhaitait que le processus de concentration ait un impact économique positif au bénéfice des ménages modestes et de l’efficience dans l’utilisation des ressources publiques -, l’agence dit « constater la difficulté à mesurer précisément les effets de la concurrence sur certains territoires, que ce soit par les prix - notamment du foncier - ou par la qualité des constructions, notamment sur les territoires en déprise. » Mais l’Ancols présente une analyse chiffrée de la dynamique de regroupement, et de sa conformité à la loi.

Une obligation de regroupement légalement encadrée

L’obligation de regroupement des bailleurs sociaux de taille insuffisante découle, rappelons-le, de l’application de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (dite « loi Elan »). Ce texte fait obligation aux bailleurs sociaux dont le parc est inférieur à 12 000 logements sociaux de se rapprocher d’autres bailleurs sociaux pour constituer un groupe. Cela suivant deux types de formats possibles :

  • Des groupes dits « verticaux », constitués d’une entité faîtière et d’un ensemble d’autres entités contrôlées par la première ;
  • Des groupes dits « horizontaux », constitués de sociétés de coordination, jouant un rôle de mutualisation des moyens, de coordination stratégique et de vigie financière.

Cette obligation de regroupement se double, pour les OPH, d’une obligation dite de fusion. Cette dernière prévoit qu’un seul OPH gérant moins de 12 000 logements sociaux peut être rattaché à une même collectivité ou un même groupement de collectivités, hors métropole du Grand Paris. Ainsi, si plusieurs OPH totalisant moins de 12 000 logements sociaux chacun sont rattachés à la même collectivité, ou au même groupement, ils doivent fusionner. 

La dynamique de regroupement des bailleurs sociaux : une réalité tangible

Conformément à sa mission, l’Ancols a réalisé au premier trimestre 2022 un contrôle thématique sur les regroupements d’organismes de logement social. Elle a, pour ce faire, réalisé un contrôle ciblé d’une quinzaine de groupes verticaux et horizontaux, et en a tiré des enseignements lui permettant de formuler des recommandations.

Au 31 décembre 2021, le secteur des organismes de logement social dont le siège social est domicilié en France métropolitaine hors Corse comprend 710 entités actives. Cet ensemble se répartit en 209 offices publics de l’habitat (OPH), 174 sociétés anonymes (SA) de HLM, 167 coopératives HLM, 111 sociétés d’économie mixte (SEM) de logements sociaux et 49 sociétés de coordination agréées et immatriculées. Ainsi hors sociétés de coordination, statut mis en place en 2021, le nombre de bailleurs sociaux actifs s’est réduit de 9,5 % entre le 31 décembre 2018 et le 31 décembre 2021, passant de 730 à 661.

Au total, constate l’Ancols, 597 organismes HLM sont en conformité avec la loi Elan. Ce qui signifie que près de 17% des bailleurs sociaux ne le sont pas encore.

Une insuffisante consolidation financière des organismes HLM regroupés

Concernant les cadres stratégiques d’utilité sociale (CSUS) qui sont des contrats d’objectifs conclus entre l’Etat les organismes, les regroupements ne s’accompagnent pas systématiquement d’objectifs chiffrés, notamment pour des engagements sur :

  • la qualité des services rendus aux locataires
  • la politique patrimoniale
  • la gestion sociale
  • la concertation avec les locataires
  • et la politique d’accession

Les CSUS analysés ne prennent pas en compte les enjeux de mixité sociale et d’attribution aux publics prioritaires.

Autre difficulté consignée par l’Ancols : lorsque la société faîtière des groupes n’est pas un organisme de logement social, des difficultés récurrentes sont constatées pour la consolidation des comptes et leur suivi, ou encore la responsabilité des cadres stratégiques obligatoires et le contrôle.

Pousser plus loin la logique du regroupement : les recommandations de l’Ancols

C’est pourquoi l’agence recommande de supprimer le critère d’une composition majoritaire d’organismes de logement social au sein des groupes verticaux et de le remplacer par l’obligation que la seule société à la tête du groupe soit un organisme de logement social.

Autre constat : contrairement aux sociétés de coordination, dont les compétences obligatoires incluent le contrôle de gestion et de la soutenabilité financière, les groupes verticaux ne disposent d’aucune obligation de suivi financier de leurs filiales.

L’Ancols déplore enfin que la constitution de groupes n’induise pas d’accroissement de la circulation des capitaux en leur sein, ce qui était pourtant un des objectifs de la loi Elan. Le secteur du logement social conserve ainsi une marge d’optimisation importante pour l’avenir. Et l’agence recommande de supprimer les freins administratifs aux avances en compte courant d’associé, aux prêts participatifs, à la souscription d’emprunts communs au sein des groupes, ou encore à l’utilisation des marges de manœuvre pour des projets en phase avec les exigences de la transition écologique.

Fin 2022, les 10 premiers groupes bailleurs portent à eux seuls avec leurs filiales près de la moitié du patrimoine des bailleurs sociaux en France. Les 2 premiers groupes, Action Logement et CDC Habitat, portent respectivement plus de 1 090 000 Logements et plus de 530 000 logements, soit 5 % des résidences principales en France(1)

À savoir

La gestion de ces groupes implique ainsi pour les banques partenaires une cohérence de services pour les filiales d’une même structure faitière et des outils pour aider à la coordination de ces grands ensembles. La banque postale a par exemple mis au point un outil de gestion et de suivi de l’encaissement des loyers en temps réel pour les groupes sur l’ensemble des filiales, ou encore des outils de rapprochement automatique des versements de loyers avec leurs locataires quel que soit le mode de paiement. Autant de services de nature à aider les groupes à gagner en efficacité et synergies et répondre ainsi aux objectifs de la loi Elan. 

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(1) Les Hlm en chiffres - Édition 2022