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Économie française : d’une évolution en V à une en W pour 2020 ? Les conséquences pour 2021

L’évolution de la crise sanitaire et des différents paramètres économiques - production, consommation des ménages, taux de chômage -, ont acté une évolution en « V », soit le scénario le plus optimiste à fin septembre. Alain Henriot, responsable des Etudes économiques au sein de La Banque Postale, fait le point sur la situation à fin 2020 et éclaire les scénarios possibles pour le début 2021.

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En « V », en « U », en virgule, en « L », en « W », en « WL », voire en « K », les scénarios relatifs à la courbe de l’économie font souvent appel à notre abécédaire. A fin septembre 2020, la situation française pouvait être décrite comme relevant du modèle en « V », soit l’hypothèse la plus optimiste. Les statistiques récemment publiées par l’Insee en font la preuve. Le couvre-feu puis le second confinement ont occasionné un fort ralentissement, sans que celui-ci ne soit comparable à celui créé par le confinement du printemps. Alors « V » ou « W » ?

L’évolution en « V » peut être ainsi décrite : chute globale de l’activité due à l'arrêt de sites de production, suivie d'un rebond immédiat dès leur réouverture, grâce à une reprise très forte de la consommation, rendue possible par deux choses : la limitation de la perte de revenus, grâce au chômage partiel, et une forte épargne accumulée pendant le confinement. 

 

Avant le second confinement, une perte d’activité passée de 30 % à 4 %

De fait, selon l’analyse d’Alain Henriot, tout converge à valider cette thèse : « Après l’été et jusque début octobre, le rebond de la croissance était fort, tiré essentiellement par la consommation des ménages. On peut dès alors avancer que les effets de la politique économique nationale ont porté. Le socle économique a tenu et fin septembre, la perte d’activité était de l’ordre de 4 %. Même s’il s’agit d’une grosse récession, il faut garder en tête que c’est sans commune mesure avec les 30 % perdus lors du confinement de mars et avril ». 

Certes, le taux de chômage a fortement bondi au troisième trimestre 2020, selon la mesure du Bureau international du Travail (BIT) : à 8,8 % en France métropolitaine en septembre, contre 7,6 % en mars. Mais, comme le rappelle Alain Henriot, « c’est somme toute raisonnable, comparé à la perte d’activité nationale. Rappelons que lors du confinement les personnes sans emploi ne déclaraient pas forcément en chercher un, car ils ne pouvaient pas, par exemple, se rendre aux entretiens, ou parce que les entreprises pouvant les accueillir avaient fermé. Il en résultait un repli atypique du taux de chômage sur la première moitié de l’année. »

 

Le vrai rebond ? Plutôt au second semestre 2021

À fin octobre, les données de Pôle emploi révélaient une reprise du chômage liée à l’instauration du couvre-feu en octobre, puis du deuxième confinement en novembre. Après un mois d’octobre quasi-normal, « la perte d’activité sur le mois de novembre est estimée entre 10 à 15 %, soit une situation très dégradée, quand celle du mois de décembre peut être qualifiée de dégradée », estime Alain Henriot, qui poursuit : « Avec la persistance de contraintes importantes qui ne relèvent toutefois pas du confinement, janvier devrait être semblable à décembre. Reste que certaines activités ne pourront pas être rattrapées ».

Le début 2021 va-t-il se jouer dans un scénario semblable à la fin d’année, plus favorable ou encore plus défavorable ? Cela demeure indéniablement très difficile à évaluer et c’est aussi ce manque de visibilité qui pénalise les agents économiques. « Les prévisions de la Banque de France tablaient sur un fort rebond au premier trimestre mais in fine, ce rebond sera surtout ressenti sur le second semestre, en forte corrélation avec la capacité à vacciner ».

A court terme donc, notre économie demeure complétement dépendante de la situation sanitaire. A moyen terme, la question se pose de savoir si cette crise se révélera vraiment différente de la crise de 2008-09 : « A l’origine, la crise sanitaire avec une acmé de deux mois se distinguait de la crise financière, moins profonde, mais dont les effets ont duré. Désormais les effets de celle que nous traversons semblent perdurer ».

Deux bonnes nouvelles

Bien moins d’entraves réglementaires, sites ouverts, protocoles sanitaires matures, reprise du commerce international tirée par l’économie chinoise : l’industrie nationale a bien mieux résisté au second qu’au premier confinement.

Le report d’un an du remboursement du PGE (Prêt Garanti par l’Etat) traduit une bonne prise en compte de la réalité de la trésorerie des entreprises et facilitera leur reprise d’activité. Ce report pourrait même être allongé à 2 ans.